IFRS 18 : Quand la convergence entre consolidation statutaire et pilotage de la performance devient normative, portée par les solutions EPM
Présentation et informations à fournir dans les états financiers
D’une lecture historiquement divergente à une restitution unifiée normative de la performance financière.
Historiquement, la consolidation statutaire et le pilotage de la performance ont coexisté sur des lectures parfois divergentes d’une même réalité économique.
IFRS 18 marque un changement de statut : cette convergence devient désormais normative.
Publiée en avril 2024 par l’IASB, la norme IFRS 18 remplacera l’actuelle norme IAS 1 – Présentation des états financiers » et amendera également les normes IAS 7 – Tableau de flux de trésorerie et IAS 8 – Méthodes comptables, changement d’estimations comptables et erreurs. Elle sera exigible à compter du 1er janvier 2027, avec un comparatif obligatoire sur 2026.
En pratique, cela signifie que les groupes devront être en mesure de produire, au plus tard fin 2026, un comparatif IFRS 18 fiable et auditable, tout en maintenant une lecture IAS 1. C’est cette contrainte temporelle, souvent sous-estimée par les directions, qui explique pourquoi nous abordons ce sujet dès aujourd’hui.
Trop souvent encore, IFRS 18 est présentée comme une simple évolution de la présentation du compte de résultat. C’est une erreur d’analyse.
En réalité, IFRS 18 structure la lecture du compte de résultat à partir d’indicateurs de performance reconnus et met fin à une ambiguïté structurelle que de nombreux groupes ont conservés pendant des années.
Avec l’introduction de catégories normatives, de sous-totaux obligatoires et l’encadrement strict des Management Performance Measures (MPM), la norme agit comme un révélateur. Et ce qu’elle révèle, c’est un manque de cohérence des structures existantes (plan de comptes, mapping…).
Ce que change réellement la norme IFRS 18
Une performance opérationnelle enfin normée
IFRS 18 introduit une structure normée du compte de résultat, fondée sur trois catégories clairement définies :
- activités opérationnelles ;
- activités d’investissement ;
- activités de financement.
Elle impose également deux sous-totaux obligatoires :
- le résultat d’exploitation : uniformisation du calcul permettant une comparabilité entre les entreprises ;
- le résultat net avant impôts sur le résultat.
Là où la norme IAS 1 laissait une large latitude aux groupes, IFRS 18 impose désormais un cadre comparable et beaucoup plus contraignant.
Le résultat opérationnel cesse d’être une notion interprétable : il devient un élément normé, attendu et auditable.
Le tableau des flux de trésorerie : la cohérence imposée
IFRS 18 ne se limite pas au compte de résultat. Elle modifie également en profondeur la logique du tableau des flux de trésorerie (TFT).
Pour les groupes utilisant la méthode indirecte, la norme impose désormais de partir du résultat d’exploitation selon IFRS 18, et non plus d’un résultat défini librement ou historiquement utilisé (résultat net, résultat opérationnel “maison”, etc.).
Par ailleurs, IFRS 18 réduit significativement les options de présentation qui existaient jusqu’ici :
- encadrement du classement des intérêts et dividendes reçus et versés ;
- règles de cohérence renforcées entre catégories du compte de résultat et catégories du tableau de flux de trésorerie;
Autrement dit, le tableau de flux de trésorerie devient une extension directe de la lecture du résultat établi selon la norme IFRS 18, et non plus un état relativement indépendant.
Pour les solutions EPM, l’impact est majeur :
- les règles de calcul du cash-flow doivent être reparamétrées ;
- le résultat d’exploitation selon IFRS 18 devient une brique structurante du modèle ;
- les incohérences historiques entre compte de résultat, tableau de flux de trésorerie et indicateurs de performance (MPM) ne sont plus tolérables.
IFRS 18 renforce ainsi un principe clé : la performance opérationnelle et la trésorerie doivent raconter la même histoire, dans le même outil.
Les MPM : enfin officiel
Le point de rupture majeur d’IFRS 18 concerne les « Management Performance Measures » (MPM) ou « mesures de la performance définies par la direction », nouvelle catégorie d’indicateurs de la performance financière introduit par la norme.
Un MPM est un sous-total de produits et de charges utilisé par la direction dans sa communication financière externe, qui reflète sa vision de la performance financière globale du groupe, et qui n’est pas défini par les normes IFRS.
Dès lors qu’un tel indicateur est communiqué publiquement (communiqués de presse, présentations investisseurs, rapport de gestion, etc.), IFRS 18 impose :
- sa présentation dans une note annexe dédiée ;
- une réconciliation avec le sous-total IFRS le plus proche ;
- des informations sur l’impôt et les intérêts minoritaires ;
- et son intégration dans le périmètre des diligences d’audit.
Autrement dit, une partie des indicateurs historiquement non-GAAP, c’est-à-dire non définis par les normes IFRS, entre désormais pleinement dans le champ auditable.
IFRS 18 oblige les groupes à formaliser et auditer les indicateurs de performance dès lors qu’ils sont utilisés à la fois en interne et dans la communication financière.
Pour les directions financières, le message est désormais sans ambiguïté : certains indicateurs de pilotage ne peuvent plus vivre en dehors du modèle de données du reporting de Consolidation et de gestion de l’EPM, et sont standardisés.
Début 2026 : le vrai point de bascule (et pourquoi attendre est une erreur)
IFRS 18 s’appliquera aux exercices ouverts à compter du 1er janvier 2027, avec retraitement obligatoire du ou des exercices comparatifs pour les états primaires et une réconciliation obligatoire pour l’exercice N-1 concernant les notes annexes.
Mais en pratique, 2026 est l’année clé.
Au plus tard fin 2026, les groupes doivent déjà être capables de :
- simuler la lecture selon IFRS 18 sur leurs données existantes ;
- produire des comparatifs fiables.
Le calendrier réel d’adaptation à la norme est désormais le suivant :
- 2026 : conception, adaptation des solutions EPM et mise en place du double reporting IAS 1 / IFRS 18 afin d’assurer la transition ;
- 2027 : première publication officielle IFRS 18 avec comparatifs.
D’un point de vue EPM, différer le chantier IFRS 18 conduit inévitablement à :
- des choix structurants réalisés dans l’urgence ;
- multiplier les retraitements manuels hors solution EPM ;
- une perte de maîtrise sur les comparatifs et la communication financière.
Pourquoi IFRS 18 impacte directement les solutions EPM
Le plan de comptes n’est plus neutre
La majorité des outils de consolidation ont été conçus autour d’une lecture IAS 1 « Présentation des états financiers » du compte de résultat.
IFRS 18 impose une nouvelle lecture économique du résultat qui ne peut pas être traitée uniquement en restitution.
Les projets les plus robustes convergent vers une approche pragmatique :
- conserver le plan de comptes existant comme référentiel de données fiable ;
- créer des vues ou hiérarchies alternatives IFRS 18 ;
- mettre en place des mappings permettant de produire un double reporting IAS 1 et IFRS 18 afin d’assurer la transition vers la norme.
Les sous-totaux IFRS 18 ne sont pas qu’un sujet de reporting
Les sous-totaux définis par IFRS 18 doivent être :
- reproductibles ;
- cohérents dans le temps ;
- explicables vis-à-vis des auditeurs.
Cela implique de les intégrer au cœur des règles de consolidation, et non de les recalculer a posteriori dans des états de restitution.
C’est un changement culturel majeur : la performance devient un élément à part entière du paramétrage du plan de comptes et pas seulement un sujet de présentation financière.
Les MPM – la fin des indicateurs de performance calculés hors solution EPM
Dans beaucoup de groupes, les MPM sont encore :
- calculés sous Excel ;
- ajustés manuellement ;
- insuffisamment documentés ;
- pour des besoins internes.
IFRS 18 rend cette situation intenable dès la phase de comparatifs. Les approches EPM structurées prévoient la création de dimensions dédiées aux MPM, permettant :
- de structurer les ajustements ;
- d’assurer la traçabilité ;
- de produire automatiquement les réconciliations exigées par la norme.
Mettre à jour l’existant : l’erreur à éviter en 2026
L’erreur classique consiste encore à considérer IFRS 18 comme « un simple chantier de reformatage du compte de résultat à livrer fin 2026 ».
Cette approche conduit presque systématiquement à :
- une multiplication des fichiers Excel pour gérer la transition entre IAS 1 et IFRS 18 et construire le bridge comparatif ;
- des réconciliations manuelles complexes et sous contrainte de délais, faute d’intégration dans la solution EPM ;
- un manque de traçabilité et de fiabilité des MPM, pourtant désormais soumis à des exigences d’audit.
La bonne pratique au contraire consiste à suivre ces quatre principes structurants :
- une gap analysis ciblée entre l’existant, les MPM et les exigences IFRS 18 restitués dans un bridge paramétré dans la solution EPM ;
- une donnée unique, plusieurs lectures (IAS 1 / IFRS 18 / pilotage) dans la solution EPM ;
- un double reporting structuré (IAS 1/IFRS 18) sur un exercice complet dès 2026 ;
- une gouvernance des indicateurs intégrée dès la phase de design.
Au-delà de l’adaptation de la solution EPM, IFRS 18 renforce une exigence de cohérence de bout en bout : les règles de classement entre exploitation, investissement et financement doivent être définies en amont, au niveau des ERP comptables, puis reprises de manière structurée dans la solution EPM. Cela implique la formalisation et la diffusion d’instructions comptables internes claires et partagées.
Ce que montrent les premiers retours du marché
Les analyses convergent :
- KPMG souligne qu’IFRS 18 fait basculer certains indicateurs managériaux dans le périmètre audité, avec un impact fort sur les processus et les outils.
- PwC met en avant la nécessité de renforcer la cohérence entre communication financière et indicateurs de performance.
- Les éditeurs EPM intègrent déjà IFRS 18 dans leurs offres, signe que le sujet dépasse largement la simple conformité réglementaire.
Comment assurer la conformité à la norme IFRS 18 dans sa solution EPM
IFRS 18 ne génère pas de problèmes, elle les rend visibles.
Les groupes aborderont la norme IFRS 18 comme une transition maîtrisée grâce à :
- un modèle EPM intégré ;
- une gouvernance des indicateurs éprouvée ;
- une clôture anticipée en parallèle run entre IAS 1 et IFRS 18 sur 2026.
Les autres découvrent, souvent trop tard, que leur pilotage de la performance repose encore sur des ajustements manuels et peu robustes.
IFRS 18 doit être traité comme un projet donnant l’opportunité de démontrer une meilleure gouvernance des données et des processus dans une solution EPM au paramétrage robuste, flexible et fiable.



